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Société

Une expo donne la parole aux hommes: "Comme les femmes, ils sont victimes de diktats de la société"

Extrait de l'exposition "Déshabillez-le !"

Extrait de l'exposition "Déshabillez-le !" - Layla Gras

"Déshabillez-le!", une exposition visible jusqu'au 21 octobre à la fac parisienne de Jussieu, appelle à s'interroger sur le ressenti des hommes face aux représentations et modèles que la société leur impose. Un questionnement essentiel pour faire avancer… la cause féministe, explique Guillemette Trognon, de l’association étudiante Celsa Hors les murs, qui organise l'exposition.

Guillemette Trognon, vice-présidente de l’association étudiante Celsa Hors les murs, organisatrice de l'exposition "Déshabillez-le!".

"Ces derniers temps on parle souvent de féminisme, mais c'est vrai qu'on en entend pas souvent parler des hommes, ou de façon assez superficielle. Nous avions envie de mettre en avant le fait que le discours porté sur les femmes peut, d'une certaine mesure, s'appliquer aussi sur les hommes. C'est une vision du féminisme pour qui l'on est tous plus ou moins à égalité. C'est bien de parler des femmes mais qu'il ne faut pas s'arrêter à cela et aller un peu plus loin. On ne cherche pas à comparer, à savoir qui souffrent le plus ou qui est le plus sous pression, mais on pense que c'est important de souligner que les hommes aussi sont soumis à des diktats de la société. Pour eux, ce sont les mecs de la téléréalité, les poupées Action-man, tous les films que l'on voit… Si la parole des femmes commence à se libérer, le ressenti des hommes n'avait jamais été questionné, comme si c'était évident.

"L'homme doit en imposer, d'une façon ou d'une autre"

Ce que montre l'exposition, c'est que des diktats sont imposés aux hommes comme aux femmes, mêmes si les acteurs qui les imposent sont pas les mêmes. Il y a une pression sur la façon dont l'homme doit être représenté. L'homme peut exister s'il ne correspond pas aux standards de beauté, mais il faut alors qu'il ait une personnalité forte, qu'il en impose d'une façon ou d'une autre: par ses muscles, par sa pilosité, ou par son caractère. Dès lors qu'il s'efface ou qu'il est trop tendre, on ne va pas lui reconnaitre un statut d'homme. C'est compliqué parce que dans le même temps on lui demande d'être un bon papa. Ce sont deux discours qui se cognent l'un contre l'autre.

Tous ceux qu'on a contacté pour l'exposition étaient enthousiastes et reconnaissaient l'intérêt de parler de ce sujet. Le Dr Hupertan, qui est sexologue, raconte qu'il a rencontré beaucoup d'hommes qui ne sont pas à l'aise avec leur sexualité ou leur attribut physique, et qui avait recours à des opérations incroyables juste pour avoir l'impression d'être dans la moyenne et se sentir mieux. Jean-Paul Brighelli (essayiste) qui a travaillé sur la pornographie et son impact sur la société, expliquait que la représentation des hommes dans le porno, qui est faussée, peut entraîner des complexes basés sur des fantasmes et des mensonges. Nous n'apportons pas de conclusion, mais nous voulions poser les bases d'une réflexion sur ce statut des hommes.

"Certaines féministes privent l'homme de son droit de parole"

Monter cette exposition, c'est notre féminisme à nous. Nous sommes attristées du comportement de certaines féministes qui vont accaparer la question de l'égalité hommes-femmes en centrant tout autour de la femme, et en privant l'homme de son droit de parole. Ce monologue ne fait pas avancer la cause. Au contraire, ça braque les féministes qui reconnaissent la part que l'homme a apporté, et ça braque les hommes qui ne sont pas dans cette image dominatrice et castratrice."

Propos recueillis par Philippe Gril