Malbouffe: faut-il surtaxer les fast-foods ? “Une idée ridicule, pathétique”, tacle le critique gastronomique E. Rubin

Philippe Etchebest et Stéphane Manigold déclarent la guerre aux kebabs, tacos ou hamburgers. Dans une tribune publiée dans les colonnes du Figaro, le chef étoilé au Guide Michelin et le fondateur du groupe Eclore proposent que les produits de fast-food soient davantage taxés que les plats cuisinés dans des restaurants traditionnels.
"Une blanquette mijotée par un maître restaurateur est taxée au même taux qu'un burger industriel réchauffé sous plastique ! ", s'insurgent-ils. Actuellement, la TVA est fixée à 10 % pour tous les plats et les boissons vendus pour une consommation immédiate, et 20 % sur les alcools.
Un bonus à la casserole
Les restaurateurs proposent de réserver un taux de TVA réduit pour les établissements qui cuisinent "eux-mêmes" leurs plats, sans se contenter de réchauffer des barquettes au micro-ondes.
Ainsi, les titulaires du titre officiel de "maître restaurateur" pourront bénéficier d'un taux à 5,5%, tandis que la TVA de la "malbouffe" serait quant à elle doublée à 20%. "Ça serait un bonus à la casserole et un malus pour le micro-ondes", argumentent-ils dans le texte.
Les restaurateurs souhaitent également protéger le terme "restaurant". Seuls les établissements où l'on cuisine "vraiment" pourront se présenter comme tels sur leur devanture, selon leur proposition.
"Une idée ridicule"
L'idée est loin de convaincre le critique gastronomique Emmanuel Rubin. "C'est une idée ridicule, pathétique", a-t-il taclé en direct dans Estelle Midi. Pour lui, une telle mesure est injuste envers les enseignes de fast-food, qui fournissent, selon le critique, une nourriture semblable à certains restaurants traditionnels.
"Qui nous sert des burgers aujourd'hui ? Les bistros, les brasseries. Et ils sont dégueulasses, à des prix indécents", avance-t-il. "La malbouffe, elle est partagée".
D'autant plus que, pour Emmanuel Rubin, une telle mesure serait impossible à appliquer. "Au moins, les fast-foods sont transparents, on les connaît. En revanche, la restauration traditionnelle, c'est le grand foutoir", continue-t-il. "Les maîtres restaurateurs, ça n'a jamais marché. On ne peut pas faire la police du micro-onde".
Le "pays de la gastonomie"
De son côté, Stéphane Manigold, restaurateur et ancien chroniqueur des Grandes Gueules, ne s'offusque pas des critiques d'Emmanuel Rubin. "Ce n'est pas parce que les anciens ont mal fait (...) qu'on ne peut pas laisser aux nouveaux acheteurs l'opportunité de faire le ménage", répond-t-il dans Estelle Midi.
Le restaurateur n'en démorre pas : pour lui, un restaurant qui cuisine des plats de qualité devrait être plus protégé qu'un marchand de "malbouffe". "C'est aussi le cas pour un maître kebabier qui fait sa viande, ajoute-t-il, il bénéficiera des mêmes avantages. Mais celui qui achète sa broche en Allemagne devra être taxé à 20%."
D'autant plus que des mesures similaires ont déjà été mises en place dans plusieurs villes, comme Amsterdam, Londres ou Toronto. "C'est quand même dingue que dans le pays de la gastronomie on n'y arrive pas", souffle-t-il.