"Il n'y a pas d'expropriation": faut-il réquisitionner les logements vacants face au froid?

Le froid continue de sévir dans le nord du pays avec des températures comprises ce jeudi matin entre -5 et -1 degrés. Dans la rue, la situation des sans-abris inquiète. Pour éviter d'autres drames après la mort de plusieurs SDF depuis le début de cet épisode de froid, certains voix plaident pour la réquisition des bâtiments vacants.
"Le nombre de sans-abris n'a cessé d'augmenter, comme celui du nombre de logements vacants, c'est inadmissible", assure Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole de l'association Droit au logement, alors que l'on recense plus de 3 millions de logements vacants et 330.000 personnes sans-abris sur l'ensemble du territoire.
A Paris aussi, la situation des 3.000 sans-abris inquiète. Le sénateur PCF de la capitale Ian Brossat veut lui aussi réquisitionner les logements vacants. L'ancien adjoint d'Anne Hidalgo en charge du Logement à la mairie de Paris a lancé une pétition pour réquisitionner 130.000 logements en attente d’être vendus ou loués, mais aussi gardés volontairement vides par leur propriétaire, selon une étude de l’Atelier parisien d’urbanisme.
Les réquisitions extrêmement rares
"Une loi existe et permet à l'État de réquisitionner des bâtiments vacants", martèle dans Apolline Matin, ce jeudi sur RMC et RMC Story, Ian Brossat. Mais les réquisitions sont rares: "Aujourd'hui, on est dans une situation absurde où les communes se tournent vers l'Etat qui demande au préfet de réquisitionner les logements, mais il ne se passe jamais rien", explique le sénateur.
"Il faut l'accord du propriétaire et il y a assez peu de propriétaires qui sont d'accord, c'est extrêmement rare. Il faut donc permettre aux communes de réquisitionner elles-mêmes car les élus locaux connaissent la situation", appelle Ian Brossat.
D'autant que les propriétaires ne risquent rien et sont même dédommagés pour ça. "Ce n'est pas une mesure qui va spolier les propriétaires puisqu'ils récupèrent leur bien, il n'y a pas d'expropriation. Et par ailleurs, ils touchent une indemnité" explique Jean-Baptiste Eyraud, le porte-parole de l'association Droit au logement. "C'est une mesure légère qui laisse un délai pour construire des logements sociaux en nombre suffisant", estime-t-il.
"Les propriétaires fournissent déjà suffisamment d'efforts"
"C'est honteux de demander aux propriétaires de supporter une carence de l'Etat", peste de son côté Sylvain Cantaloup, président de l'UNPI (Union nationale des propriétaires immobiliers). "Les propriétaires fournissent déjà suffisamment d'efforts et la vacance n'est pas souhaitée et n'est pas un moyen de gérer son patrimoine. Un bien n'a pas vocation à être vacant", ajoute-t-il.
Pour le sénateur Ian Brossat, avant même de se tourner vers les petits propriétaires immobiliers, il faut réquisitionner des bâtiments vacants et même "d'anciens parkings". "C'est beaucoup plus facile de réquisitionner d'anciens parkings réaménagés en centre d'hébergement, on l'a déjà fait, qu'un appartement dans une copropriété. Et ça permet de créer beaucoup plus de places en une seule fois", explique-t-il.
A Paris, où "400 enfants dorment dans la rue chaque nuit" selon Ian Brossat, la mairie a déjà réquisitionné un ancien lycée vide pour héberger 120 personnes. Les dernières réquisitions massives en France remontent aux années 1990.