Faut-il conditionner les aides aux entreprises à des hausses de salaires?
Alors que les prix ont encore augmenté de 4,8% en août dernier, les salaires stagnent. Si le Smic a bien été augmenté cinq fois depuis un an et demi, pour une augmentation totale de 8,9%, les bas salaires, eux, n'ont pas forcément suivi. Et de nombreux salariés se retrouvent enfermés dans une "trappe".
Pour obliger les entreprises à augmenter leurs employés, la députée Renaissance de Paris Astrid Panosyan-Bouvet plaide pour conditionner les aides de l'Etat à des "bonnes pratiques sociales et salariales" dans les sociétés. "Ce sont plutôt les grandes entreprises qui sont dans le viseur", explique l'élue dans "Charles Matin", ce mercredi sur RMC et RMC Story, voulant ainsi pousser les entreprises à augmenter les bas salaires.
"Le Smic est un salaire d'entrée mais être smicard à vie ou rester scotché aux mêmes bas salaires, c'est aller à l'encontre de la promesse républicaine. Il y a aussi un tassement des grilles salariales au bas de l'échelle. Car même si vous progressé, vous restez scotché au Smic ou vous avez de faibles progressions malgré les compétences et les expériences acquises", défend Astrid Panosyan-Bouvet.
"Qui va déterminer ce qu'est une bonne pratique salariale?"
Concrètement, si une entreprise embauche un salarié au Smic, il faudrait que son salaire, dans les cinq à dix ans suivants, approche les 1.800-2.000 euros nets par mois, alors que le Smic actuel est de 1383,09 euros nets mensuels.
Voilà pour le principe. Reste maintenant à définir qui sont les bons et les mauvais élèves: "Il y a des entreprises qui n'ont pas de minimas conventionnels inférieurs au Smic, soit très peu d'échelons en-dessous du Smic", explique la députée qui compte cibler davantage les grandes entreprises.
"Qui va déterminer ce qu'est une bonne pratique salariale?", s'interroge de son côté Benoît Serre, vice-président de l'Association nationale des DRH. "Il faut voir ce que fait une entreprise par rapport à ses moyens. C'est la critérisation qui pose problème", souligne-t-il. Augmenter les salaires risque également de "freiner la création d'emplois", assure le DRH.
Baisser les cotisations salariales
Astrid Panosyan-Bouvet compte sur la conférence présidentielle sur les bas salaires prévue dans les prochaines semaines pour mettre le sujet sur le devant de la scène. Et pour permettre ces hausses de salaires, elle plaide pour jouer sur les cotisations salariales, l'écart entre le brut et le net, qui rend les augmentations trop chères pour les entreprises.
Une idée qui plaît aux employeurs. "Travailler sur l'écart brut/net, ça, c'est une réponse", reconnaît Benoît Serre, qui juge la proposition pertinente. Même son de cloche pour Christophe Doré, président de l'union des entreprises de coiffure. Dans son secteur, les premiers échelons de salaires ne sont que quelques euros au-dessus du Smic. Et les professionnels sont également touchés par l'inflation. "Il y a une augmentation de l'énergie, des salaires, de la matière première, donc ça vient impacter énormément les marges des entreprises notamment de coiffure", assure-t-il, expliquant qu'il pourrait augmenter les salaires avec une baisse des charges.
Assez rare pour le remarquer, la proposition de la députée Renaissance a le mérite de convaincre les syndicats. "Il faut que le gouvernement impose aux patrons de réelles négociations salariales et effectivement, s’il y a des aides publiques dans ces entreprises, il faut une contrepartie d’augmentations salariales", assure à RMC Amar Lagha, secrétaire général de la CGT commerce.
Pour parvenir à une solution politique, la députée Astrid Panosyan-Bouvet espère la création d'un groupe transpartisan à l'Assemblée nationale.