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Bombardements à Rafah: "S'indigner ne suffit pas", alerte le vice-président de Médecins du Monde

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Après des frappes israéliennes qui ont fait 45 morts et des centaines de blessés dimanche à Rafah, le vice-président de Médecins du Monde Jean-François Corty demande plus d'actions internationales sur RMC et RMC Story ce mardi.

"S'indigner ne suffit pas". Jean-François Corty, médecin et vice-président de Médecins du Monde, a réagi ce mardi sur RMC et RMC Story au bombardement mortel sur des réfugiés palestiniens à Rafah dimanche. "C'était en zone dite "sûre", mais on voit bien qu’il n’y a pas de lieu sûr que ce soit pour les humanitaires, les civils et les otages".

"Ça fait des mois qu'on alerte sur le fait qu'il n'y a pas de zone sûre dans la bande de Gaza. Il y a toujours eu une mortalité importante. Fin novembre on avait déjà 30% de mortalité dans les endroits qui étaient censés être protégés", rappelle le médecin.

"Il faut arrêter d'envoyer des armes dans la région"

Une attaque qualifiée "d'accident tragique" par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, et qui a fait 45 morts et 249 blessés. Nombre de pays, dont la France ont, depuis, condamné ce bombardement de civils, mais pour le vice-président de Médecins du Monde, il faut agir.

Tout le monde sait ce qui se passe à Gaza. Ce sont des milliers et des milliers de civils qui meurent depuis des mois. Et les diplomaties s’indignent. Il faut un cessez-le-feu et arrêter d’envoyer des armes dans la région", détaille Jean-François Corty.

Ce sont surtout les Etats-Unis, selon lui, qui continuent à soutenir financièrement et militairement Israël dans ses attaques: "Ils proposent de l’aide qui est une poudre aux yeux, et dans le même temps continuent à donner des armes. Il y a une forme de variable d’ajustement autour de l’aide qui est insupportable". Le vice-président de Médecins du Monde demande des actions concrètes, comme "mettre la pression sur les belligérants".

Une aide difficile sur place

Sur place, ce qu'il faut, c'est de l'aide. "Il y a très peu d'aide qui entre. Quelque 200 camions sont entrés ce week-end par le sud, mais il en faudrait 600 à 700 par jour pour pouvoir répondre aux besoins vitaux", explique-t-il.

On va être en rupture de stocks de médicaments et de fioul dans les prochains jours si la situation ne se relâche pas, si on n'arrive pas à faire rentrer de l'aide depuis Israël ou Rafah".

Trente de ses collègues de Médecins du Monde sont au nord de Rafah. "Ils ne sont pas en sécurité" et doivent faire "de la santé primaire, c’est-à-dire médecine générale, et de la santé mentale parce qu’il y a une énorme pression liée aux drones et bombardements permanents". Avant d'ajouter: "Beaucoup de femmes et enfants ont besoin de soutien. Mais on a du mal à retransférer les malades vers des structures de santé, notamment car des hôpitaux n’existent plus, il en reste 4 ou 5 par rapport aux 36 qui existaient avant".

"La situation est extrême, parce que le système de santé ne répond pas aux besoins et que le blocus fait toujours son effet. L’eau, la nourriture, les médicaments ne rentrent pas", ajoute-t-il.
L'invité du jour : Jean-François Corty - 28/05
L'invité du jour : Jean-François Corty - 28/05
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Respecter le droit humanitaire international

Ce que dénonce aussi Jean-François Corty, c'est que le droit humanitaire international n'est pas respecté: "L’aide n’est pas proportionnée, les humanitaires n’arrivent pas à bosser correctement, les Nations unies aussi sont en danger".

Comme il le rappelle, le camp bombardé dimanche était "le camp d’humanitaires où intervenait notamment l’UNRWA (Administration des Nations unies pour le secours et la reconstruction)". Ces bombardements, c'est donc, selon lui, "une manière aussi de mettre la pression sur les civils, sur le Hamas, mais en rupture avec le droit humanitaire international".

C’est une forme de mépris aux ordonnances de la Cour Internationale de Justice qui a redit vendredi qu’il y a un risque accru de génocide", appuie-t-il.

Une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU prévue

Le Conseil de sécurité de l'ONU se réunit ce mardi après-midi en urgence sur la situation à Gaza. Ils ont demandé un cessez-le-feu immédiat le 25 mars dernier. Le 24 mai, c'est la Cour internationale de justice (CIJ), la plus haute juridiction des Nations unies, qui ordonnait à Israël d’arrêter "immédiatement" son offensive militaire à Rafah. "Ce ne sont pas des guignols, ce sont des dizaines et centaines de juristes", pour Jean-François Corty.

Ce qu'il demande donc, c'est "de soutenir toutes les initiatives diplomatiques. Les Européens aussi peuvent faire quelque chose, pas seulement les Etats-Unis".

Il faut qu'à l’échelle européenne, "Emmanuel Macron fasse en sorte qu'on puisse remettre en question l’envoi d’armes, qu'on puisse avoir des leviers diplomatiques un peu plus puissants pour faire en sorte que le droit humanitaire international soit respecté et que les humanitaires puissent faire leur boulot. Alors peut-être qu'on aura un espoir". Mais aujourd’hui, "la situation est trop limitée", conclut le vice-président de Médecins du monde.

Solenn Guillanton