Manifestations: "Après 15h d'affilée, difficile de garder son self-control", raconte un ex-policier

Les violences policières, "ça n'existe pas". C'est ce qu'a de nouveau martelé le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin ce mercredi sur RMC et BFMTV. "Les violences policières, ça n'existe pas. Les violences de certains policiers qui ne respectent pas les ordres, ça existe et on doit les sanctionner", a répété le pensionnaire de la place Beauvau avant de se targuer d'avoir fait sanctionner 121 policiers en 2021, et d'avoir nommé une magistrate au lieu d'un policier à la tête de l'Inspection générale de la police nationale, l'IGPN.
Ancien policier, Rodolphe est sans surprise du même avis. Et si des policiers ont été parfois filmés en train de commettre des actes totalement gratuits et très violents, c'est en raison de leurs conditions de travail. "J'ai fait 15h d'affilée sur du maintien de l'ordre. Croyez-moi, la dernière heure, quand vous en prenez plein la tête, quand vous voyez la haine des gens et les destructions, c'est difficile de garder son self-control, c'est impossible", explique-t-il ce mercredi dans "Les Grandes Gueules", reconnaissant que certains policiers peuvent devenir violent.
Trois mois d'arrêt après avoir pris un pavé sur la tête
"De temps en temps, un policier, deux policiers, dix policiers, vont peut-être dépasser les bornes, mais ce ne sont pas des violences policières, ce sont des violences de certains policiers", ajoute l'ancien fonctionnaire sur RMC et RMC Story.
"J'étais payé 1.900 euros nets et j'ai fait sur une année 713 heures supplémentaires. Qui pourrait accepter ça? J'ai pris un pavé sur la tête lors de mon dernier maintien de l'ordre, j'ai eu trois mois d'arrêt pour un traumatisme crânien avec une plaie ouverte de dix centimètres. En face, il a pris six mois avec sursis. Est-ce que c'est normal?", interroge Rodolphe.
"C'est aberrant de dire que la police est violente", abonde l'ancien patron du Raid, Bruno Pomart. "Les sanctions sont appliquées contre les policiers violents", ajoute-t-il, expliquant que des sanctions administratives, comme des rétrogradations, des mises à pied ou des blâmes, sont également prononcées.
Des arrestations arbitraires?
Mais pour l'avocate Marie-Anne Soubré, "Gérald Darmanin ferait mieux d'arrêter de parler". "Il parle toujours avant de réfléchir, comme il a parlé sur Sainte-Soline ou sur le Stade de France avant que les faits ne démentent ce qu'il avait dit". Elle rappelle aussi que les violences policières ne sont pas seulement des coups de poing distribués gratuitement mais peuvent aussi prendre la forme de "voies de fait", des arrestations arbitraires, de façon préventive, avant une manifestation ou pendant une manifestation.
Ainsi, depuis le début de la mobilisation contre la réforme des retraites, des centaines de personnes ont été arrêtées, placées en garde à vue avant d'être libérées sans poursuites. C'est le cas notamment de deux Autrichiens de 15 ans, arrêtés arbitrairement parce que présents au mauvais endroit au mauvais moment et relâchés après une intervention de l'ambassade d'Autriche.
Pour tenter d'apaiser les tensions avant la nouvelle journée de manifestation prévue ce jeudi 6 avril, le préfet de police de Paris Laurent Nunez a invité la défenseure des Droits Claire Hédon à suivre la manifestation parisienne depuis le centre de contrôle de préfecture.