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Retraites: rebond de la mobilisation, blocage du 7 mars… Ce qu’il faut retenir de ce 11 février

Dans la Cité phocéenne, les syndicats donnent un chiffre de 140.000 manifestants, en baisse par rapport aux précédentes mobilisations (illustration).

Dans la Cité phocéenne, les syndicats donnent un chiffre de 140.000 manifestants, en baisse par rapport aux précédentes mobilisations (illustration). - CLEMENT MAHOUDEAU / AFP

Au soir de la quatrième journée de mobilisation intersyndicale contre la réforme des retraites, au cours de laquelle de 963.000 à 2,5 millions de personnes ont manifesté en France, l’heure du bilan a sonné avant d’anticiper les suites du mouvement.

Un rebond relatif, mais une mobilisation qui ne faiblit pas. Après une nouvelle journée de manifestation aux quatre coins de la France, le moment est venu de faire les comptes pour les syndicats et l’exécutif afin de jauger l’état de la mobilisation contre le projet de réforme des retraites.

En premier lieu, les chiffres. Au sortir de ce quatrième épisode de manifestation, la CGT a annoncé qu’un total de 2,5 millions de personnes avaient arpenté les rues de différentes villes françaises pour clamer leur mécontentement vis-à-vis de la réforme portée par Elisabeth Borne. Selon le syndicat, 500.000 de ces manifestants se trouvaient sur les pavés de la capitale samedi après-midi, tandis que 120.000 autres étaient à Marseille.

Les organisations syndicales ont de quoi se réjouir de ces chiffres. Si les autorités ont annoncé, de leur côté, un total de 963.000 manifestants en France, dont 93.000 à Paris, les différentes données pointent vers un renforcement de la mobilisation lorsque l’on compare avec les statistiques de la grève du mardi 7 février.

Néanmoins, il faut aussi souligner que les chiffres de la mobilisation du 11 février sont en baisse par rapport à la journée de grève du 31 janvier dernier. 2,8 millions de manifestants étaient présents, selon les syndicats, sur le territoire français, soit 300.000 de moins que ce samedi. De son côté, le ministère de l’Intérieur avait tablé sur un chiffre de 1,212 million de manifestants le 31 janvier dernier en France, contre 963.000 pour cette quatrième journée de manifestations.

En province aussi, les cortèges ont rassemblé plus de monde que le 7 février, avec un écart croissant entre les chiffres des autorités et des syndicats, en particulier à Marseille (entre 12.000 selon la police et 140.000 selon l’intersyndicale) et Toulouse (entre 25.000 et 100.000).

Comme les fois précédentes, les défilés se sont déroulés globalement dans le calme, hormis quelques incidents à Rennes, Nantes ou Paris. 10.000 policiers et gendarmes étaient mobilisés, dont 4.500 dans la capitale, où 10 personnes ont été interpellées et un gendarme blessé à l'oeil, selon un bilan de la préfecture de Police de Paris réalisé à 18h30.

Politiques et syndicats au créneau contre le gouvernement

De nombreuses personnalités politiques étaient présentes dans les rangs des cortèges, notamment dans les fiefs respectifs des figures de chaque parti. Jean-Luc Mélenchon, le fondateur de La France Insoumise, était par exemple à Marseille pour marcher avec les manifestants. Anticipant, par erreur, “la journée sociale la plus dense depuis 50 ans”, l’ancien candidat à l’élection présidentielle de 2022 a taclé le président de la République, assurant que si ce dernier comptait “sur l’usure” des opposants à la réforme, il se trompait alors “de pays”.

Présent dans le cortège du côté de Paris, le député (LFI) Thomas Portes, qui s’est récemment fait suspendre pour 15 jours de l’Assemblée Nationale après un tweet polémique le montrant poser son pied sur un ballon à l’effigie du ministre Olivier Dussopt, a de nouveau fait parler de lui en assumant sa publication. Il a fait part de sa “surprise” face à la sanction reçue pour son tweet, tout en niant la qualification d’appel à la violence.

De l’autre côté de l’échiquier politique, Marine Le Pen a de son côté pris la parole sur les réseaux sociaux en fin de journée. Sur Twitter, la présidente du groupe RN à l’Assemblée a souligné que “l’exécutif ne peut pas continuer à regarder ailleurs en refusant d’entendre les Français. Il est encore temps de revenir à la raison et de renoncer à cette brutale régression sociale”. Des députés du Rassemblement national se sont aussi affichés sur les réseaux sociaux en train de distribuer des tracts critiques à l’égard de la réforme, et ce à différents endroits du pays.

Enfin, du côté des syndicats, on estime que "la balle est dans le camp" de l'exécutif selon Philippe Martinez. Les syndicats réclament qu'à l'Assemblée, l'article 7, qui porte la mesure d'âge, puisse faire l'objet d'un vote. Mais rien n'est moins sûr, alors que les députés de la Nupes ont déposé des milliers d'amendements, débattus dans une ambiance tumultueuse.

"On veut voir qui va effectivement se prononcer pour ou contre" la mesure d'âge, a déclaré Philippe Martinez, indiquant que les syndicats comptent "interpeller dès aujourd'hui" les parlementaires de l'arc républicain pour qu'ils mesurent "leur responsabilité".

Et ensuite? Le 7 mars en ligne de mire

Si peu de membres de la majorité se sont exprimés à l’heure de la rédaction de ces lignes, à l'exception par exmple de Karl Olive sur Twitter, le gouvernement a probablement les yeux déjà rivés vers les jours à venir afin de voir l’ampleur future du mouvement de contestation.

Difficile toutefois de prévoir précisément toutes les différentes actions qui surgiront dans les prochains jours, à l’image de cette mobilisation inattendue à l’aéroport d’Orly samedi, et qui a causé l’annulation d’un vol sur deux.

Ce qui est sûr à l’heure actuelle, c’est que le cinquième acte de la contestation contre la réforme des retraites aura lieu le 16 février prochain, à l’appel de l’intersyndicale. Les différents représentants des organisations syndicales ont d’ailleurs affirmé qu’ils étaient prêts “à durcir le mouvement” dans les prochains jours et les prochaines semaines.

Au-delà de cette journée du jeudi 16 février, une autre date semble d’ores et déjà cristalliser toutes les attentions: le mardi 7 mars. Les différents syndicats ont appelé à une manifestation d’ampleur pour le premier mardi du mois de mars, expliquant qu’ils étaient prêts à “mettre le pays à l’arrêt le 7 mars”.

L’intersyndicale à la RATP (CGT, FO, UNSA, CFE-CGC) a même été plus loin, appelant à la première grève reconductible du mouvement. La CGT-Cheminots emboîtera le pas à cette proposition.

Alexis Lalemant, avec l'AFP