Un an de guerre en Ukraine: le conflit en 8 dates clés
24 février 2023. En Ukraine, la guerre sévit toujours, un an après le lancement de l’invasion russe sur le sol ukrainien. Aujourd’hui, personne ne peut prédire exactement l’issue de cette guerre féroce ayant causé la mort de plusieurs centaines de milliers de personnes, militaires et civils. Fin janvier, selon des estimations occidentales, ils seraient des centaines de milliers de personnes à avoir perdu la vie ou être blessés au cours de ces douze derniers mois de conflit, dans les deux camps.
Si cet affrontement fratricide entre Ukraine et Russie ne semble pas parti pour se clôre rapidement, voici ce qu’il faut retenir des grandes étapes, par date et par période, en huit points synthétiques, de cette guerre aux conséquences géopolitiques et économiques majeures.
1) Octobre 2021 - Les prémices d'un conflit hors normes
Depuis le mois d’octobre 2021, et au cours des semaines qui suivent, la situation à la frontière russo-ukrainienne intrigue et inquiète la communauté internationale. Dans le cadre d’exercices militaires planifiés, selon les dires de Moscou, des dizaines de milliers de soldats russes se regroupent à quelques encablures du territoire ukrainien.
Le renseignement américain notamment, assure que l’armée de Vladimir Poutine prépare une action militaire sur le sol de la nation ukrainienne, historiquement liée à la Russie par sa proximité géographique et ses liens ethniques et culturels.

Puis, le 5 février 2022, les services de renseignements américains donnent le ton : 110.000 soldats russes seraient prêts, à la frontière, à lancer une invasion de grande ampleur. Dans le même temps, conscient depuis plusieurs semaines de l’escalade des tensions entre Kiev et le Kremlin, Emmanuel Macron se rend à Moscou pour y rencontrer le président russe afin de négocier un apaisement de la situation.
Vladimir Poutine reçoit alors le président français dans son palais présidentiel moscovite, autour d’une géante table ovale de six mètres de long, chaque président assis à une extrémité. L’impression d’une distance infinie entre les deux présidents captive l'œil de tous les observateurs, et l’image fait alors le tour du monde. A l’issue de cette rencontre, Vladimir Poutine affirme être disposé à tout faire pour trouver des “compromis” et éviter de ce fait une escalade militaire en Ukraine…

2) 24 février 2022 - Lancement d'une guerre à laquelle personne ne voulait croire
Moins de vingt jours après la dernière rencontre entre Vladimir Poutine et Emmanuel Macron, la situation à la frontière ukrainienne bascule. Dans la nuit du 23 au 24 février, peu avant 4h du matin, le président de la Russie prend la parole à la télévision russe.
Il annonce le lancement d’une “opération militaire spéciale” en Ukraine, avec pour objectif une “démilitarisation et une dénazification de l’Ukraine”. Lors de cette allocution, il promet de conduire au tribunal “ceux qui ont commis de nombreux crimes, responsables de l’effusion de sang de civils, notamment des citoyens russes”, faisant allusion aux régions séparatistes pro-russes situées dans l’Est de l’Ukraine au cœur d’un conflit depuis 2014.
Dans les heures qui suivent la déclaration de Vladimir Poutine, les premières explosions de missiles se font entendre à différents endroits du pays, notamment à Kiev la capitale ukrainienne. En réponse, les Occidentaux annoncent dès le 25 février des premières sanctions contre l’économie russe et certaines de ses personnalités, dont Vladimir Poutine et d’autres oligarques.
La guerre en Ukraine est définitivement lancée, et plonge le monde entier dans une incertitude et une peur majeure d’escalade internationale, aux risques extrêmes de dissuasion nucléaire.
3) Mars/avril 2022 - Des premières preuves de cruauté russe
Alors que les forces russes ont rapidement progressé lors des premières semaines de combats, l’armée ukrainienne répond avec force ville par ville, mètre par mètre, pour tenter de freiner l’avancée des troupes de Vladimir Poutine.
La guerre en Ukraine, grâce à l’avènement des smartphones et donc des millions d’objectifs photos et vidéos à disposition de tous, le conflit est documenté de manière inédite. Le 9 mars 2022, des journalistes et des civils ukrainiens filment les décombres encore fumants d’une maternité frappée par des missiles russes à Marioupol, située dans le sud de l’oblast de Donetsk. Ce sont les premiers signes d’actes russes susceptibles d’être considérés comme des crimes de guerre.
Mais le choc sera d’autant plus douloureux pour la communauté internationale quelques semaines plus tard, entre les 1er et 2 avril 2022. Les militaires ukrainiens réussissent à contrer l’armée russe et récupèrent le contrôle de la localité de Boutcha, située dans l’oblast de Kiev.

À mesure que la ville est reprise, l’horreur se dévoile aux yeux du monde. Des centaines de civils, habitants de la ville de Boutcha, sont retrouvés morts. Des corps sans vie jonchent notamment différentes rues de la ville, comme cet homme exécuté alors qu’il était encore sur son vélo et dont la photographie fera la une de multiples journaux dans le monde. À la vue des images des centaines de civils exécutés, au moins 458 à date, le président Macron assure que “les autorités russes devront répondre de ces crimes”.
D’autres ignominies très probablement perprétrées par l'armée de Vladimir Poutine seront découvertes les mois suivants, à l’instar du charnier d’Izioum.
4) 23 juin 2022 - L'Ukraine officiellement candidate à rejoindre l'UE
La guerre en Ukraine provoque un réel bouleversement des relations internationales. L’Union européenne et l’Otan sont inévitablement au centre de l’intérêt géopolitique. L’Ukraine, qui lorgne depuis des années sur une possible candidature pour adhérer à l’Europe, est officiellement déclarée candidate à l’adhésion le 23 juin 2022, en compagnie de la Moldavie. Volodymyr Zelensky, le président ukrainien, avait lancé les premières manœuvres de cette candidature le 28 février 2022, quatre jours seulement après le début de la tentative d’invasion russe.
Le processus pour intégrer l’Union européenne peut toutefois durer jusqu’à une dizaine d’années. L’Ukraine mise néanmoins sur une entrée dans l’UE à l’horizon 2024, un objectif difficile à atteindre.
Du côté de l’Otan, les lignes bougent aussi suite à cette guerre. La peur majeure de la Russie est de voir de nouveaux pays s’allier à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord, qui pourrait alors se retrouver aux portes des frontières russes.
Une peur légitime, puisque des pays historiquement neutres et frontaliers avec la Russie vont effectivement demander leur adhésion à l’alliance occidentale, à l’instar de la Suède et de la Finlande qui ont présenté une candidature conjointe.
5) 21 septembre 2022 - Le rapport de force s’équilibre, Poutine mobilise 300.000 réservistes
L’opération militaire russe est en cours depuis déjà plus de six mois, et n’avance clairement pas au rythme espéré par Vladimir Poutine. Pour contrer localement les percées russes, l’armée ukrainienne bénéficie de l’aide des pays occidentaux qui fournissent aux soldats de Zelensky des armes tactiques comme des lance-roquettes Javelin, produits aux États-Unis, et très efficaces contre les blindés russes.
Le rapport de force s’équilibre sur le front, et l’Ukraine lance même une contre-offensive d’ampleur : l’armée ukrainienne commence par le Sud, obligeant les Russes à se masser vers la ville de Kherson. Dans le même temps, au nord, les forces de Zelensky tentent aussi une percée qui aboutira à une victoire stratégique : Kharkiv, ville stratégique d’environ 30.000 habitants, est reprise lors de cette contre-offensive éclair.
Sentant le vent changer légèrement de direction, Vladimir Poutine veut prouver une nouvelle fois sa force de frappe. Le 21 septembre 2022, le patron du Kremlin annonce la mobilisation exceptionnelle de 300.000 réservistes russes. Les jours suivants l’annonce, des reporters de différents médias postés aux frontières de la Russie observeront la fuite de nombreux citoyens russes pour échapper à cette mobilisation. Selon le New York Times, le nombre de personnes ayant quitté le pays s’élèverait à environ 200.000 personnes.
Enfin, moins de dix jours après l’instauration de cette mobilisation partielle de sa population, Vladimir Poutine tente un nouveau coup d’éclat. Le 30 septembre, après des référendums à la légitimité contestée organisés dans différents oblasts de l’Est ukrainien, le président russe annonce l’annexion des oblasts de Donetsk, Louhansk, Kherson et Zaporijia.
La communauté internationale demande alors aux Russes de respecter l’intégrité territoriale de l’Ukraine, malgré la victoire du “oui” revendiquée par Poutine dans les régions soumises au scrutin. En réponse, l’ancien membre du KGB n’hésite pas à agiter la menace de l’arme nucléaire si ces nouvelles régions qu’il considère comme russes venaient à être attaquées.
6) 8 octobre 2022 - Le pont de Crimée bombardé au lendemain de l'anniversaire de Vladimir Poutine
À l’automne 2022, malgré les grands coups de communication de Vladimir Poutine, l’édifice russe commence à réellement vaciller. Si les Ukrainiens résistent de manière inattendue sur leur territoire, à l’image de la capitale, Kiev, de moins en moins touchée par des frappes aériennes, la menace se rapproche aussi du sol russe.
Au lendemain de l’anniversaire de Vladimir Poutine, le 8 octobre 2022, le pont de Crimée, qui relie la Russie à la Crimée et qui est notamment utilisé par l’armée russe pour transporter du matériel vers le front, fait l’objet d’une attaque. Un camion piégé provoque une grande explosion et détruit une partie de l’édifice. Le transport y est donc partiellement interrompu, et empêche pendant plusieurs jours les forces russes d’utiliser ce pont, reconnu comme le plus long d’Europe, pour transporter de nouveaux équipements militaires.

Un peu plus d’un mois après, alors que les combats continuent de faire rage sur plusieurs fronts et dans plusieurs localités ukrainiennes, l’armée ukrainienne se fend d’une annonce plus que significative. En cette date historiquement célèbre du 11 novembre, les troupes de Volodymyr Zelensky annoncent être entrées dans Kherson, la plus grande ville conquise par les Russes (près de 300.000 habitants) depuis le début de la guerre. Le bastion est libéré par les soldats ukrainiens, et les civils fêtent sans relâche l’arrivée de leur armée.
Puis, le 15 novembre 2022, c’est de nouveau la peur d’une escalade mondiale du conflit qui refait surface : une explosion est signalée en Pologne, membre de l’Otan, dans la petite commune de Przewodow, non loin de la frontière avec l’Ukraine. Varsovie affirme que le missile ayant provoqué la mort de deux personnes est de fabrication russe.
Très vite, la communauté internationale se demande si la Russie a franchi la ligne rouge en attaquant directement un pays membre de l’Otan, et donc allié des États-Unis. Mais le soufflé retombe tout aussi rapidement lorsque l’on apprend que l’ogive appartient en réalité à la défense antiaérienne ukrainienne. Nouvelle désescalade.
7) Début d’année 2023 - Chars, armes, l'aide occidentale s'accélère
La fin d’année 2022 et le début 2023 seront notamment marqués par les appels du pied répétés du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, auprès de l’Occident pour obtenir davantage d’armes et de matériel de défense. Les alliés de l’Ukraine le savent, ils doivent rester extrêmement prudents avec l’aide apportée à l’armée ukrainienne, au risque que la Russie considère ce soutien logistique comme une réelle entrée dans le conflit.
Le 14 janvier 2023, un premier pas est franchi par le Royaume-Uni. Son premier ministre, Rishi Sunak, confirme qu’il enverra 14 chars Challenger-2 aux Ukrainiens, devenant le premier pays de l’Otan a envoyé des blindés lourds vers l’Ukraine. Le 25 janvier, l’Allemagne emboîte le pas des Britanniques et accepte de livrer des chars Leopard-2 à l’Ukraine. La France, de son côté, ne ferme pas la porte à la livraison de chars Leclerc… mais n’accède pas pour autant à la demande de Zelensky. Si le président ukrainien aimerait aussi obtenir des appareils aériens de la part de l’Occident, Français et Américains tentent de limiter leurs livraisons d’armement lourd.
Cela n’empêche pas les États-Unis, par exemple, de faire voyager des soldats ukrainiens en Oklahoma, afin de les former à l’utilisation de missiles Patriot, un système perfectionné de défense antiaérienne et évidemment nécessaire à l’armée ukrainienne pour tenter de résister aux nombreux bombardements de l’aviation russe.
Pour montrer son soutien indéfectible à l’Ukraine, le président américain en personne, Joe Biden, s’autorise une visite surprise à Kiev le lundi 20 février. L’occasion, notamment, d’annoncer de nouvelles livraisons d'armes et une nouvelle aide financière de 500 millions de dollars, au-delà du geste hautement symbolique d’une visite présidentielle américaine dans une capitale en guerre, visée encore aujourd’hui par d’éphémères frappes aériennes russes.

8) 21 février 2023 - Poutine ne lâche rien
Enfin, à seulement quelques jours du premier funeste anniversaire du lancement de la guerre en Ukraine, un nouveau coup de communication est entrepris par le président russe, Vladimir Poutine. Dans un discours à la nation de plus de deux heures, le lendemain de la visite de Joe Biden à Kiev, Vladimir Poutine annonce le retrait temporaire de la Russie de l’accord New Start. Cet accord, véritable héritage de la Guerre froide, visait à limiter les capacités nucléaires respectives des États-Unis et de la Russie, avec une limite fixée à 1.550 ogives nucléaires pour chacun des deux pays.

Une manière pour Vladimir Poutine de brandir, une fois encore, la menace nucléaire dans ce conflit au futur totalement incertain et toujours aussi menaçant pour la stabilité internationale.